Inauguration

MODIMIR CAPEBLANCHE avaict tout juste finit de visiter ces lieux après un interminable voyage. Il arriva doucement dans une taverne, qui semblait aussi jeusne que le reste des bastiment alentours. Il entra en regardant les personnes présentes. Ce fut rapide. En dehors de lui-mesme, il n'y avait personne. Simplement le tavernier, un peu seul dans son recoin du fond de salle qui lui servait de comptoir. Il semblait occupé à jouer avec un morceau de cuir, un ancien tanneur sans douste. Il en avait d'ailleurs les bonnes mains reconnaissables. Le vieil homme ne les avait plus, c'est qu'il commençait à se faire vieux, le Modimir, du haut de ses... enfin il ne savait plus bien son asge.

Il s'assit en coin de tablée, bien au centre, peut estre qu'on viendrait lui tenir compagnie lorsque bruits et lumières s'apanouiraient dans la sombre pièce, tiède malgré cet été brulant.

"- Le Salut, tavernier ! Comme d'habitude pour moi ! Ah oui.. je ne suis encore jamais vesnu. Et bien sert moi un de tes bons vins !"

On le servit alors. Pas très bavare le tavernier d'icelui. En même temps s'il était le premier ici... Il sorti alors avec sa longue et large choppine, qu'il n'avait encore gouté, puis se plaça à l'extérieur de la taverne à pièce unique, juste devant la porte. Il tenait sa choppine d'une main, sa pipe à pavot de l'autre. Il n'aimait fumer qu'assis, aussi l'allumerait-il une fois installé à l'intérieur. Il sembla à Modimir qu'on parla non loin. Sans reconnaistre les formes et encore moins les différentes testes, il les invita d'un geste et de quelques mots à se joindre à lui, d'un fort accent savoyard, faisant ainsi pour chacun qui passait et qui passerait par céans.

"- Ouaip ! Vouv'nez inaugurer la taverne ? On a bien l'droit à une ptite pause des fois ! Ouaip, pô."

Le temps était à l'orage. La lumière, fort sombre en ce milieu de journée, avait quelque chose d'irréel. Le Chancelier de Lorraine, à cheval, cherchait à s'abriter avant que le déluge ne commence. On ne lui avait rapporté aucune auberge dans ceste campagne, et il était bien loin de son castel familial. Songeant à son père qui lui recommandait de prendre une suite, il regretta de n'avoir point suivi ses conseils. Alors qu’il se préparait à recevoir des trombes d'eau sur ses cheveux blonds relevés en une coiffure compliquée, il aperçut un bâtiment au bord du chemin. Il portait enseigne. Le nom de la taverne? Il n’y en avait pas… étrange…

Une auberge que l'on gagne lorsque l'on cherche abri ou présence. Le Chancelier, le cœur serré mais heureux de n'avoir pas à subir la pluie, poussa la porte de l'établissement.

Il n'y avait encore personne à l'intérieur, hormis un homme à l'air maussade devant le comptoir, en plus du tavernier. L'endroit était assez bien éclairé, mais les tabourets et les tables semblaient avoir traversé les âges.

Bonjour! dit Barthelemy avec un sourire. Il prit place à une table et commanda avec politesse une mirabelle. On lui répondit qu'il n'y en avait point. Une bière alors, merci.

On entra.
On commanda à boire.
Il n'y avait pas.
La mirabelle se faisait rare.

Modimir avait mangé.
Bien tard, quand il se sent l'estomac écœuré,
Le tavernier, un oeil à la lucarne
D'où le soleil, clair comme un chaudron récuré,
Lui darde une migraine et fait son regard darne,
Déplace son ventre de tavernier.

A l'aise, il s'approche de l'autre homme, lui tendant la main.

"- Le bonjour, et le mauvais à vous. Permettez moi de me présenter, Modimir Capeblanche, Porte-Parole de Savoy. J'imagine que nous sommes tout deux des gens du mesme Monde. Vous venez du siège de la Fédération de l'Empire Occidental n'est-ce pas ? Inutile de répondre, cela se voit à vos vestementardises. Permettez-moi de passer un moment avec vous, je me sens un peu seul dans cet endroit... on se croierait sous Philippe Auguste !"

Capeblanche rit alors de sa propre blague, bienheureusement : le tavernier Bernard s'en étaist allé plus loin.